Loi sur la radiodiffusion
C-11: le milieu culturel se réjouit, mais gardera l'oeil sur sa mise en application
Par La Presse Canadienne
Si l'industrie culturelle et les représentants des artistes se félicitent de l'adoption de la Loi sur la diffusion continue en ligne, ils suivront de très près la mise en forme de cette réforme tant attendue de la radiodiffusion intégrant des plateformes comme Netflix, YouTube et Spotify.
À la suite d'un long feuilleton politique, la loi a obtenu jeudi la sanction royale, plusieurs organisations culturelles parlant d'«un moment historique».
L'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) voit dans l'adoption de C-11 «un grand jour pour le milieu musical».
«Avec l’adoption du projet de loi , une étape majeure a été franchie vers l’instauration d’un système plus équitable qui contribuera à un meilleur rayonnement de nos musiques qui en éprouvent un besoin vital », a souligné par communiqué le président de l’ADISQ, Jean François Renaud.
L'ADISQ souligne deux autres étapes «tout aussi importantes» à venir : la publication d’un décret donnant des consignes sur la mise en œuvre de la réforme de la loi sur la radiodiffusion et donc la mise en œuvre de la loi par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).
Maintenant que la Loi sur la diffusion continue en ligne a été adoptée, le gouvernement fournira des directives générales au CRTC, qui sera responsable de mettre en application la loi, a rappelé jeudi Patrimoine canadien.
Aux fins de consultation publique, une ébauche de cette orientation stratégique sera publiée dans la Gazette du Canada afin de recueillir les commentaires de toute personne souhaitant participer, comme les intervenants, les artistes, les entreprises, les créateurs numériques et la population canadienne.
Le CRTC a indiqué par communiqué pouvoir «maintenant commencer à bâtir le système de radiodiffusion de l'avenir».
«Nous partagerons notre plan détaillé et lancerons nos premières consultations publiques sous peu», a-t-on indiqué.
Le respect du système par les géants du web
La Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (SPACQ) a parlé d'une «étape cruciale pour la reconnaissance et la valorisation du travail des créatrices et créateurs de musique», et a dit croire que ceux-ci pourront mieux gérer l'utilisation de leurs œuvres et bénéficier d'une rémunération juste et équitable.
La SPACQ estime que la loi C-11 permettra d’assurer la protection des droits d'auteur «dans un contexte de plus en plus complexe et évolutif», notamment en ce qui concerne l'utilisation de la musique en ligne et la gestion des droits numériques.
Dans la mise en pratique de la loi, elle s'attend à ce que les plateformes numériques internationales respectent le système-cadre de radiodiffusion canadien, en contribuant aux fonds existants de soutien de la musique, en mettant en valeur la musique d'ici et en collaborant par le partage d’informations avec le CRTC.
«On espère atteindre une neutralité technologique et des débats rationnels et démocratiques devant le CRTC, à la suite du décret d’instruction», a indiqué par communiqué la directrice générale de la SPACQ, Ariane Charbonneau.
Parlant d'un «moment historique», l'Association québécoise de la production médiatique (AQPM) souligne aussi que l’attention de toutes les parties prenantes se tourne maintenant vers la mise en œuvre de ce nouveau cadre législatif.
«Les représentants de Patrimoine canadien ont fait valoir auprès du milieu culturel des retombées importantes découlant de ce nouveau cadre réglementaire; je les invite à s’assurer que les directives données au CRTC permettront de réaliser cet engagement», a affirmé la présidente-directrice générale de l’association des producteurs, Hélène Messier.
«Il est essentiel que toutes les entreprises de radiodiffusion contribuent de façon significative à la création, à la production, à la diffusion et à la mise en valeur des contenus audiovisuels canadiens pour assurer la pérennité de l’industrie nationale», a-t-elle ajouté.
Le mouvement de défense des voix d'ici dans la radiodiffusion publique et les médias Les AMIS a aussi souligné qu'il restait «encore du travail à faire avant de faire défiler le générique du projet de loi C-11».
Selon l'organisation, la législation met en place «deux normes différentes pour l'utilisation des ressources créatives d'ici: une norme pour les radiodiffuseurs canadiens et une norme inférieure pour les géants étrangers de la diffusion en continu».
«Voilà pourquoi Les AMIS travailleront d'arrache-pied pour nous assurer que la directive ministérielle contienne les modifications finales au scénario qui permettront de créer un écosystème de radiodiffusion juste et équitable», a affirmé par communiqué la directrice générale, Marla Boltman.
Soutenir les artistes d'ici
Dans un communiqué conjoint, des associations professionnelles des artistes ont salué la voie ouverte à une réforme «attendue depuis longtemps».
L’Union des artistes (UDA), la Guilde des musiciennes et musiciens du Québec (GMMQ), l’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ) et la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) ont dit se réjouir de l'adoption de C-11.
«Même si ce projet de loi n’impose pas les mêmes obligations aux plateformes étrangères qu’aux diffuseurs canadiens, une telle réforme était importante et il incombera au CRTC de s’assurer de mieux soutenir les artistes d’ici et leurs talents», soutiennent ces organismes.
Tout de même, la nouvelle présidente de l'UDA, Tania Kontoyanni, a dit croire que «cette adoption impose aux géants du web des règles du jeu plus équitables».
Selon le président de l'ARRQ, Gabriel Pelletier, les principes directeurs de la loi permettront le rayonnement de la culture canadienne notamment «à travers l’obligation d’avoir recours aux ressources créatrices canadiennes et par la protection et la promotion de la culture francophone et de la langue française partout au pays».
«Rappelons que la plateforme électorale du gouvernement actuel promettait de ramener la part de la production francophone à 40% de l’enveloppe du FMC (Fonds des médias du Canada), en hausse par rapport au 33% actuel. Le décret d’instruction au CRTC devrait être une manière d’y arriver», a affirmé M. Pelletier.
Jean Philippe Angers, La Presse Canadienne
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