«Censure» et manque de transparence
Le ministre Charette rejette les critiques du professeur Pierre-Olivier Pineau
Par La Presse Canadienne
Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, rejette les critiques et les accusations d’un spécialiste de l’énergie qui a démissionné du Comité consultatif sur les changements climatiques du gouvernement Legault.
Celui-ci a dénoncé «une sorte de censure», un manque de vision et de transparence, des programmes inefficaces ainsi que l’absence de remise en question sur la façon dont les Québécois consomment l’énergie.
Les membres du Comité consultatif sur les changements climatiques, un organisme qui a pour mission de conseiller le ministre Charette, sont «totalement» indépendants, a indiqué le ministre lors d’une mêlée de presse mercredi matin.
«Le gouvernement ne s'immisce d'aucune façon dans les activités du comité. D'ailleurs, il a produit plusieurs rapports au cours des dernières années, rapports qu'on a pu analyser avec attention et on a mis en application déjà plusieurs mesures qui sont contenues dans ces rapports-là», s’est défendu le ministre.
Il a ajouté que «d'aucune façon, on s'ingère dans la gouvernance du comité, dans les sujets d'étude du comité».
«Sorte de censure» et manque de transparence
Pierre-Olivier Pineau, qui a démissionné du comité il y a une semaine, a une version différente de celle du ministre.
Le professeur au département des sciences de la décision à HEC Montréal et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, a dénoncé mardi «une sorte de censure», un manque de vision et de transparence et des programmes de lutte au changement climatique inefficaces.
Le comité travaillait récemment à produire un bilan indépendant de l’action climatique du gouvernement. Selon M. Pineau, il aurait été opportun que le comité se penche sur certaines dépenses du Fonds vert, qui est devenu le Fonds d’électrification et de changements climatiques (FECC), et qui ont fait l’objet de critiques.
La commissaire au développement durable Janique Lambert a notamment souligné l’an dernier que 80 % des dépenses prévues au FECC étaient destinées à des projets qui «n’ont pas d’indicateurs ni de cibles adéquates».
Le professeur Pineau voulait que le comité fasse une synthèse des critiques du FECC, de l’efficacité des différents programmes, de leurs indicateurs et de leurs cibles, «car le Québec ne réduit pas ses émissions de gaz à effet de serre comme il faudrait».
Il croit que des employés du ministère de l’Environnement, qui étaient chargés de documenter les avis du comité dans le but de faire un bilan des actions du gouvernement, «n’avaient pas la latitude pour mettre de l’avant et documenter les idées» qui étaient discutées au sein du Comité consultatif sur les changements climatiques.
«J’avais l’impression qu’il y avait comme une sorte de censure qui était exercée, que les thèmes sur lesquels on avait travaillé en sous-comité ne se retrouvaient plus dans les documents qu’on discutait, et ça, ça me troublait et j’avais un peu perdu espoir que le comité puisse faire un travail critique indépendant sur le bilan de l’action climatique du gouvernement québécois», a résumé le chercheur.
Selon le ministre Charrette, «ce sont les critiques d'un individu qui n'est plus membre du comité aujourd'hui».
Le ministre a ajouté qu’il est en communication avec le ministère qui, lui, est en communication avec les membres du comité.
«Ce qu'on a réitéré à son directeur, à son président, Monsieur Webster, c'est que le gouvernement sera toujours là pour répondre aux besoins qui nous sont formulés, en termes d'effectifs ou en termes de moyens», a indiqué Benoit Charette.
Le Comité consultatif sur les changements climatiques est présidé par Alain Webster, professeur au département d’économique et au Centre universitaire de formation en environnement et développement durable de l’Université de Sherbrooke.
La Presse Canadienne a tenté d’obtenir une entrevue avec M. Webster et les autres membres du comité, mais l’agence de presse n’avait obtenu aucune réponse positive au moment de publier cet article.
Le professeur Pierre-Olivier Pineau, qui co-rédige chaque année l’État de l’énergie au Québec, a qualifié le comité de «dysfonctionnel et non productif».
Il a également déploré que les programmes du gouvernement pour lutter contre les changements climatiques ne permettent pas de remettre en question notre rapport à la consommation d’énergie.
Selon le professeur, «pour faire une transition énergétique, il faut aller au-delà de simplement améliorer l’efficacité technique des équipements qui nous entourent, il faut repenser notre consommation d’énergie et c’est ce que ces programmes ne font pas».
Stéphane Blais, La Presse Canadienne
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