Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal scientifique Sports Medicine
Les sportifs sont des consommateurs insoupçonnés de nicotine, dit une étude
Par La Presse Canadienne
Les sportifs de calibre mondial sont des consommateurs insoupçonnés de nicotine, révèle une étude réalisée par un chercheur ontarien.
Le professeur Toby Mündel, de l'université ontarienne Brock, et ses collègues espagnols et italiens ont ainsi découvert de la nicotine dans environ 20 % des quelque 61 000 échantillons d'urine qui avaient été prélevés lors de compétitions nationales et internationales organisées en Italie entre 2012 et 2020.
L'étude ne permet pas de déterminer comment la nicotine a été consommée ni d'identifier les pays où elle est la plus populaire. Elle a toutefois été détectée dans 55 % des échantillons fournis par des joueurs de baseball, contre 43 % pour les joueurs de hockey, 42 % pour les joueurs de football (à ne pas confondre avec le soccer) et 29 % pour les joueurs de basketball.
Ces taux d'utilisation sont de deux à quatre fois supérieurs à ceux retrouvés dans la population en général, selon les chercheurs.
Le taux d'utilisation de la nicotine était aussi deux fois plus élevé dans les échantillons fournis par les athlètes qui pratiquent un sport d'équipe que dans ceux provenant d'athlètes qui pratiquent un sport individuel.
«C'est probablement un phénomène culturel, a commenté le professeur Mündel. On sait que dans les sports d'équipe (...) on peut être contraints de faire certaines choses simplement pour faire partie du groupe, pour éviter de se démarquer des autres.»
L'utilisation de la nicotine viserait donc essentiellement à resserrer les liens entre coéquipiers. Il compare à ce titre la nicotine à l'alcool et au cannabis que certains sportifs utilisent pour célébrer leurs exploits ou encore pour soulager la pression qu'ils ressentent.
Il est très peu probable, poursuit-il, que les athlètes qui consomment de la nicotine le font pour améliorer leurs performances. Aucune étude scientifique sérieuse ne permet de croire que la nicotine puisse être utile à cette fin. «Il n'y a pas grand-chose de positif qu'on puisse dire au sujet de la nicotine», a dit le professeur Mündel.
La seule contribution potentielle de la nicotine à la performance pourrait découler de son effet stimulant sur le cerveau. Cela pourrait expliquer pourquoi elle était particulièrement populaire dans les sports qui ont une composante tactique et qui nécessitent des habiletés particulières, comme le plongeon, l'escrime, la lutte et le golf.
Elle était nettement moins populaire parmi les adeptes de sports qui exigent un grand effort cardiovasculaire, comme les marathoniens, les nageurs, les cyclistes et les avironneurs.
«La plupart des gens vont consommer (de la nicotine) sous forme de tabac, a dit le professeur Mündel. On sait que ça peut seulement nuire à la santé et à la physiologie du corps. Donc pour les athlètes d'endurance, ça peut seulement nuire à la performance. Mais pour les athlètes dont le sport exige de la force et de la puissance et des habiletés précises, la nicotine et le tabac ne seront pas aussi nuisibles que pour l'endurance.»
Les joueurs de hockey représentent un cas un peu particulier, et on pourrait s'étonner de constater que la nicotine est aussi populaire auprès d'athlètes qui sont appelés à fournir un tel effort cardiovasculaire.
Contrairement aux marathoniens ou aux nageurs, souligne le professeur Mündel, l'effort des hockeyeurs n'est exigé que le temps de leur présence sur la glace, soit 60 ou 90 secondes, avant une pause de quelques minutes.
«Je ne dis pas que (le hockey) n'est pas exigeant physiquement, mais l'effort demandé au système aérobique ou d'endurance n'est pas le même que pour un marathonien», a-t-il précisé.
La nicotine est inscrite au programme de surveillance de l'Agence mondiale antidopage depuis 2012. Cela veut simplement dire que les laboratoires accrédités par l'AMA doivent en analyser la présence dans les échantillons qui leur parviennent, sans plus.
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal scientifique Sports Medicine.
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
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