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Produire plus d'électricité

Le Canada fera face à un immense défi énergétique au cours des 25 prochaines années

durée 09h30
19 juillet 2023
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Par La Presse Canadienne

Le Canada devra produire plus d'électricité au cours des 25 prochaines années que ce qu'il a généré au cours du dernier siècle afin de soutenir une économie carboneutre d'ici 2050, révèle un nouveau rapport du groupe d'études Forum des politiques publiques.

Pour réduire notre dépendance aux combustibles fossiles et passer à une électricité sans émissions pour propulser nos voitures, chauffer nos maisons et faire fonctionner nos usines, il faudra doubler, voire tripler, la quantité d'énergie que nous produisons actuellement, estime le gouvernement fédéral.

«Imaginez chaque barrage, turbine, centrale nucléaire et panneau solaire à travers le Canada, puis imaginez-en quelques autres à côté», indique le rapport du groupe, qui sera publié mercredi.

Cela va coûter cher – la plupart des estimations se chiffrent en milliers de milliards.

Cela nécessitera également, selon le rapport, de consulter les Autochtones, de mettre en place une coopération intergouvernementale et une prise rapide de décision et de construction, des domaines dans lesquels le Canada n'est pas nécessairement le plus efficace.

«Un rendez-vous avec le destin»

«Nous avons rendez-vous avec le destin», a déclaré Edward Greenspon, président du Forum des politiques publiques. 

«Nous devons construire, construire, construire… nous sommes loin derrière là où nous devons être et il ne nous reste pas beaucoup de temps», a-t-il ajouté.

Plus tard cet été, le ministre de l'Environnement, Steven Guilbeault, publiera un nouveau règlement exigeant que toute l'électricité produite au pays provienne de sources non émettrices d'ici 2035.

Pour M. Greenspon, cet objectif comprend deux défis majeurs à relever : augmenter massivement la quantité d'énergie que nous produisons et rendre tout cela propre.

En moyenne, il faut plus de quatre ans pour faire approuver un nouveau projet de production d'électricité par Ottawa, et plus de trois ans pour de nouvelles lignes de transmission, tout cela avant qu'une seule pelle ne creuse le sol.

Construire est une autre chose. Le barrage du site C en Colombie-Britannique, en construction depuis 2015, ne sera pas mis en service avant 2025. Entre la première proposition et son exploitation, onze ans se sont écoulés pour le projet de nouvelle ligne de transmission du nord du Manitoba au sud de la province.

«Nous devons agir très rapidement, et probablement avec une approche différente, vous savez, sans obstacles, sans temps morts», a prévenu M. Greenspon.

Réticences et planification

Il y a d'importantes questions sans réponse sur la nouvelle recette énergétique, et la vitesse de l'abandon de l'énergie fossile est l'une des plus grandes batailles politiques qui se préparent dans le pays.

Six provinces, dont les trois plus grandes, tirent plus de 90 % de leur électricité de sources propres, notamment l'hydroélectricité, le nucléaire et l'éolien.

Quatre provinces — le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Alberta et la Saskatchewan — dépendent encore fortement du charbon ou du gaz naturel pour leur électricité.

Les premiers ministres de l'Alberta et de la Saskatchewan ont déclaré que la réglementation de 2035 sur l'électricité propre était trop coûteuse et qu'ils ne pourraient tout simplement pas la respecter.

Ils visent plutôt 2050, lorsque le Canada veut être carboneutre, ce qui signifie que toutes les émissions de gaz à effet de serre seront capturées et ne seront pas autorisées à s'échapper dans l'atmosphère où elles contribuent au réchauffement climatique.

Le gouvernement fédéral a suggéré qu'il pourrait y avoir une certaine flexibilité, mais n'a pas encore détaillé comment celle-ci s'articulerait.

Vers «25 années difficiles»

M. Greenspon a déclaré qu'il y avait des signes que la plupart des gouvernements saisissaient maintenant l'énormité du défi.

En 2022, le budget fédéral n'a mentionné l'électricité que 20 fois. Un an plus tard, il est apparu 88 fois, avec des milliards de dollars promis pour aider à construire et à transmettre de l'énergie propre.

Toutes les provinces ont ou sont en train de déclarer leurs plans d'énergie pour les 30 prochaines années. En juin, la Colombie-Britannique a annoncé qu'elle lancerait un appel pour de nouvelles sources d'énergie renouvelable en 2024, la première fois qu'elle le fera en 15 ans. La province a l'intention de commencer à ajouter 3 000 gigawattheures de production d'électricité chaque année à partir de 2028, suffisamment pour alimenter 270 000 foyers.

Il y a cinq ans, le gouvernement conservateur de l'Ontario a dépensé près de 300 millions de dollars pour mettre fin à des centaines de projets d'électricité renouvelable que le gouvernement libéral précédent avait signés. Le premier ministre Doug Ford a déclaré que l'électricité n'était pas nécessaire et que l'énergie éolienne détruisait le système énergétique de la province.

La semaine dernière, cependant, le ministre de l'Énergie de l'Ontario, Todd Smith, a présenté un plan énergétique qui comprend des milliards de dollars dans de nouveaux projets nucléaires ainsi qu'un retour aux projets éoliens et solaires que le gouvernement a autrefois qualifiés de gaspillage d'argent.

L'Ontario, comme l'Alberta et la Saskatchewan, s'attend à dépendre du gaz pour une certaine électricité pendant un certain temps afin de maintenir la stabilité.

Mais la demande augmente plus vite que prévu, et la construction de nouvelles infrastructures d'électricité propre n'arrive pas à suivre le rythme.

«Nous allons vivre 25 années difficiles», craint M. Greenspon.

Le Québec a déjà dû commencer à limiter l'expansion industrielle parce qu'il ne peut pas combler tous les besoins en électricité.

Cette province, avec ses 62 centrales hydroélectriques, produit tellement d'électricité qu'elle en vend beaucoup au sud de la frontière. Mais avec l'augmentation de la demande, le ministre provincial de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, a averti en mai que l'excédent d'électricité prendrait fin d'ici 2026.

«Nos surplus ont fondu comme des glaciers sous le soleil des changements climatiques», avait-il déclaré dans un discours à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Mia Rabson, La Presse Canadienne

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